Projet VTOL : l’avenir du transport aérien léger décarboné ?

Fin 2022, Groupe ADP a inauguré sur son site de Pontoise un « vertiport » capable d’accueillir des aéronefs 100% électriques, à décollage et atterrissage vertical (VTOL). Une première mondiale qui s’inscrit dans la volonté de proposer de nouvelles solutions de mobilité urbaines et interurbaines à faible impact environnemental. Nous avons interrogé Solène Le Bris, responsable du projet VTOL au sein du groupe Innovation ADP, pour nous en dire plus sur les expérimentations à venir.

Interview de Solène Le Bris, Responsable du projet VTOL chez Groupe ADP

Le projet VTOL déployé par Groupe ADP est dévoilé lors de l’inauguration du vertiport de Pontoise, une première mondiale.
Le projet VTOL déployé par Groupe ADP est dévoilé lors de l’inauguration du vertiport de Pontoise, une première mondiale.

Qu’est-ce que le projet VTOL mené par Groupe ADP ?

Solène Le Bris. VTOL signifie Vertical Take-Off and Landing, ou « décollage et atterrissage vertical » en français. Le projet consiste à expérimenter le vol d’aéronefs légers de transports de personnes dans le ciel francilien, avec l’objectif de les voir voler un jour de manière autonome, sans pilote. C’est une innovation majeure dans le secteur aérien, qui s’inscrit pleinement dans une stratégie de décarbonation. Groupe ADP est le premier dans le monde à avoir développé une zone d’expérimentation VTOL avec toutes les composantes du monde UAM (urban air mobility). Nous pourrons tester dans ce « vertiport », situé sur notre site de Pontoise, l’exploitation grandeur nature d’une offre de service VTOL. L’objectif est d’être prêt pour déployer notre réseau de cinq vertiports pour les Jeux olympiques de 2024 (Charles de Gaulle, Le Bourget, L’héliport de Paris, Saint-Cyr et Austerlitz).

 

Combien de passagers les VTOL peuvent-ils accueillir ?

S. L. B. Il faut savoir qu’il y a plus de 400 projets constructeurs dans le monde. Mais seule une poignée d’aéronefs devrait réussir à être homologués entre 2024 et 2026 avec en tête celui de Volocopter, partenaire du Groupe ADP.  Leur premier modèle, VoloCity, pourra accueillir un pilote et un passager. Leur second modèle, VoloRegion, pourra faire monter un pilote et trois passagers. D’autres VTOL sont en cours de construction, avec une capacité de transport plus importante, mais leur certification n’interviendra pas avant 2026. Avec Volocopter, nous sommes sur du 100% électrique. Ce sera une aviation sans émission et aux nuisances sonores fortement réduites, comparées à un hélicoptère qui fait environ 4 fois plus de bruit. Il faut préciser que le niveau de sécurité d’un VTOL répond aux mêmes standards de sécurité que ceux exigés dans l’aviation commerciale.

 

En quoi consisteront ces expérimentations ?

S. L. B. L’inauguration du vertiport de Pontoise a permis de montrer que le projet était mature, tant sur la partie bâtiment en tant que telle que sur son intégration au sein d’une infrastructure aéroportuaire. Il est indispensable désormais de pouvoir tester in situ son fonctionnement et de voir ce que cela implique concrètement, du point de vue de l’expérience passager et de l’opérationnel. L’avantage du site de Pontoise, c’est que nous avons pu y reproduire à taille réelle l’ensemble de l’écosystème : le vertiport, le stand avion, l’avion (le temps de l’inauguration), la zone de décollage et d’atterrissage. Nous pourrons expérimenter les systèmes d’accueil des aéronefs, les process indispensables à leur rotation, ainsi que les différents process d’embarquement des passagers. Il reste aussi de grands défis à relever, dont l’intégration des aéronefs dans un espace aérien parisien bien fréquenté. Nous prévoyons de tester les VTOL sur deux axes aériens, en étroite collaboration avec la DGAC et l’Agence européenne de la sécurité aéronautique. Le premier partira de l’héliport de Paris situé à Issy-les-Moulineaux pour relier Versailles, l’autre partira de l’aéroport Paris-Charles de Gaulle (CDG) pour se rendre vers Austerlitz en passant par le Bourget.

Vertiport de Pontoise*

 

Vertiport de Pontoise*

Qu’en est-il de l’interdiction de survoler Paris ?

S. L. B. Vous avez raison, il est interdit d’entrer dans l’espace aérien au-dessus de la capitale. D’ailleurs beaucoup disaient que Paris serait la dernière ville au monde à pouvoir déployer ce type de vol à cause de cette interdiction. Finalement, nous serons les premiers à le faire ! Notre approche est de réutiliser les couloirs hélicoptères qui existent, avec un appareil qui sera moins bruyant et ainsi de réduire l’impact sur les habitants. Nous travaillons, par ailleurs, avec la DGAC a une exemption pour pouvoir rejoindre Austerlitz.

 

Quelle offre de service imaginez-vous pour ces VTOL ?

S. L. B. Dans un premier temps, nous projetons de mettre en place des vols réguliers, avec un horaire bien précis, pour faciliter leur intégration dans le trafic aérien commercial. Par la suite, l’objectif est de tendre vers un modèle de vols à la demande, comme ce qui existe aujourd’hui pour les taxis ou les VTC, avec des offres de prix comparables. Mais demain le projet des VTOL ne se limitera pas au transport commercial de personnes. Nous sommes persuadés que ce nouveau vecteur aérien pourra être utilisé pour les urgences médicales, surtout dans une ville aussi congestionnée que Paris. Dans cette perspective, Groupe ADP a engagé des discussions avec l’AP-HP (Assistance Publique – Hôpitaux de Paris) pour connaître leurs besoins et anticiper le modèle à mettre en place. À titre d’exemple, beaucoup de greffons sont transportés chaque année depuis le Bourget. Et dans le cas d’un arrêt cardiaque, chaque minute sauvée permet d’augmenter les chances de survie de la victime de 10%. Avec quelques minutes de gagnées, cela peut passer à 30 voire 40%.

 

Comment Hub One s’intègre-t-il à ce projet ?

S. L. B. Les équipes Hub One nous apportent leur expertise en matière de télécommunications dans les environnements aéroportuaires innovants. Lorsque le VTOL décolle et atterrit, il a besoin d’énormément d’informations en temps réel. Et une fois en vol, si on se projette vers un pilotage autonome, il faudra une géolocalisation des aéronefs supérieure à ce que l’on demande aujourd’hui aux appareils. Aujourd’hui, les constructeurs utilisent principalement ce qui se fait déjà dans le cadre des communications aériennes existantes. Mais demain, dans le cadre d’une offre de service opérationnelle, il faudra des infrastructures spécifiques hautement performantes. Nous nous appuierons sans doute sur les réseaux 4G privée / 5G disponibles sur les aéroports parisiens. Côté passager, Hub One pourra nous accompagner sur la traçabilité des bagages, même si pour le moment la question n’est pas encore d’actualité, car les premiers passagers voyageront léger.

 

  • crédits photos : Arnaud Gaulupeau

Jérémie PAPPO
Jérémie PAPPO

Responsable innovation

Jérémie PAPPO est Responsable Innovation chez Hub One. Le sport et la technologie sont ses principaux centres d’intérêts. Ancien handballeur de compétition, ce sport est selon lui, un bon moyen de se dépenser et d’aller au-delà de ses limites. De nature curieux, il aime découvrir de nouveaux objets. L’idéal pour lui étant de pouvoir expérimenter toutes ces nouvelles découvertes une fois avoir compris leurs fonctionnements. Son gadget préféré ? Sa montre connectée. Convaincu des progrès en termes de nouvelles technologies, il espère prochainement, en dénicher un nouveau dont il sera encore plus addict !
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