Le rôle émergent des intermédiaires de confiance
Dans un environnement où la donnée est un levier stratégique, les intermédiaires de confiance s’imposent comme des partenaires incontournables pour assurer un partage responsable, sécurisé et profitable des données à toutes les parties prenantes.
Loin d’être une contrainte, leur adoption devient un atout pour les entreprises qui souhaitent exploiter pleinement le potentiel des données numériques tout en respectant les principes règlementaires, d’éthique et de transparence.
À quoi sert un intermédiaire de confiance ? Quel est son rôle et qu’offre-t-il aux organisations désireuses d’optimiser l’utilisation de leurs données ? Faisons le point avec nos experts.
![+530% : c’est l’augmentation du volume mondial de données d’ici 2025 (de 33 zettaoctets en 2018 à 175 zettaoctets en 2025). Source : Commission européenne.[1]](https://www.hubone.fr/wp-content/uploads/2025/04/hubone-1744098385.webp)
Intermédiaires de données : faciliter le partage, l’accès et la protection des données
Les données sont devenues une ressource essentielle pour les organisations, leur gestion sécurisée et transparente est un enjeu majeur. Les intermédiaires de confiance (aussi appelés prestataires de services d’intermédiation de données – PSID), jouent un rôle crucial dans la régulation des échanges d’informations entre différentes parties prenantes.
Véritable tiers de confiance, son rôle est de sécuriser et de fluidifier la circulation des data entre leurs détenteurs et des utilisateurs, garantissant le respect des réglementations en vigueur, telles que le RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données) ou encore le Data Governance Act (DGA) en Europe.
Le cadre règlementaire des intermédiaires de données
Avec la mise en place du Data Governance Act, l’Union Européenne a posé les bases d’un partage de données encadré, encourageant le partage de données de manière contrôlée et régulée et en favorisant l’émergence d’espaces de partage de données intersectoriels (data spaces).
Contrairement aux agrégateurs de données qui collectent et exploitent directement les informations pour leur propre bénéfice, les intermédiaires de confiance se positionnent comme des facilitateurs neutres. Leur mission est d’assurer une interopérabilité sécurisée, sans utiliser les données à leurs propres fins commerciales.
Un rôle essentiel à l’heure de la collecte massive de données
L’essor des technologies numériques et la croissance exponentielle des volumes de données rendent nécessaire l’émergence d’acteurs capables d’encadrer et de sécuriser leur gestion. Plusieurs facteurs expliquent l’importance croissante des intermédiaires de confiance.
Les organisations collectent des quantités massives de données. Or, le stockage et la gestion de ces informations sont très complexes, notamment en raison des réglementations strictes qui encadrent leur utilisation. Sans intermédiaire, de nombreux risques émergent :
- Vol de données et cyberattaques : La multiplication des bases de données mal sécurisées favorise les incidents de sécurité.
- Silos d’information : Chaque entreprise développe ses propres bases de données, limitant la fluidité des échanges entre pairs.
- Perte de confiance des consommateurs : La méfiance grandissante vis-à-vis des grandes plateformes pousse les consommateurs à exiger plus de transparence sur leurs données.
Bénéfices pour les organisations et cas d’usages concrets
L’intégration d’un intermédiaire de confiance dans la gestion des données d’une organisation apporte une vraie valeur ajoutée, notamment en matière de sécurité, de conformité et de performance.
Dans un contexte où la réglementation autour des données devient de plus en plus stricte, les entreprises doivent s’assurer qu’elles respectent les exigences légales sous peine de sanctions. En déléguant cette responsabilité à un tiers de confiance, elles minimisent les risques et renforcent la confiance de leurs clients et partenaires. La gestion transparente des informations devient ainsi un avantage concurrentiel, rassurant les utilisateurs sur l’utilisation de leurs données.
Un autre bénéfice majeur réside dans l’amélioration de l’interopérabilité entre les différentes entités qui échangent des données. Aujourd’hui, la plupart des entreprises fonctionnent en silos, ce qui complique la collaboration et limite l’exploitation du potentiel des données. Les intermédiaires de confiance permettent de fluidifier ces échanges ouvrant la voie à de nouvelles opportunités commerciales et à l’innovation.
Agriculture, aéroports, mobilité… l’intermédiation de données en action
Un intermédiaire de données trouve des applications concrètes dans plusieurs secteurs, notamment l’industrie, la mobilité, l’agriculture ou encore la santé. En facilitant un échange sécurisé et transparent des données, ces plateformes permettent aux entreprises et organisations de mutualiser leurs informations tout en respectant les réglementations en vigueur.
Lors de la préparation d’un avion par exemple, plusieurs prestataires interviennent dans un laps de temps souvent restreint. Bien que certaines tâches puissent être réalisées en parallèle, d’autres nécessitent une synchronisation précise. En cas d’incident ou de retard, il est essentiel d’informer rapidement tous les acteurs impliqués, en particulier le responsable de la coordination pour le compte de la compagnie aérienne. L’accès aux données d’info vols et aux jalons de livraison des bagages permet ainsi d’anticiper d’éventuels retards et d’en limiter les conséquences opérationnelles.
Autre exemple concret d’intermédiation des données : le secteur agricole. Les exploitants agricoles peuvent partager leurs données de production, météorologiques ou d’usage des sols avec des partenaires tout en gardant un contrôle total sur leur diffusion et leur exploitation. Ce partage structuré permet d’optimiser les rendements, d’améliorer la traçabilité des produits et d’accéder à des services innovants, tout en garantissant la conformité aux réglementations européennes.
Intermédiation des données : les enjeux à venir
Dans cette dernière partie, nous avons demandé à Sébastien Picardat, consultant en stratégie de données, quelle est sa vision du marché, son degré de maturité et quels sont les enjeux à venir. Il nous répond :
Dans un contexte de développement exponentiel des usages des données des organisations, notamment avec l’essor de l’IA, les organisations sont de plus en plus sensibilisées sur la gouvernance de leurs données et la maîtrise de leurs usages.
C’est pour établir un climat de confiance que la réglementation européenne encadre l’activité d’intermédiation de données, régulée par une autorité publique dans chaque Etat-Membre (l’ARCEP en France). Cette activité est opérée par un prestataire technique qui mutualise les fonctions de confiance (comme l’identité numérique des organisations et des personnes, la gestion du consentement et la supervision des transactions de données…). Ce dernier peut également implémenter des règles spécifiques de chaque filière pour s’adapter aux besoins de chaque cas d’usage.
Les principaux challenges liés à cette activité émergente sont :
- la robustesse de son modèle économique qui doit permettre à terme d’assurer sa pérennité en phase d’exploitation ;
- son interopérabilité sémantique et technique avec d’autres intermédiaires de données dans d’autres filières ;
- sa contribution à la standardisation des données pour créer une ontologie commune entre les acteurs réunis autour d’un cas d’usage, notamment avec l’appui de l’IA générative.
En conclusion, l’année 2025 sera l’année de la maturité des intermédiaires de données qui verront leur rôle se réaffirmer lors de l’évaluation à mi-parcours du Data Governance Act au 4ème trimestre 2025.
Zoom sur la dernière publication du groupe Caisse des Dépôts « Décodons les espaces de données ».
Sources :
[1] Stratégie européenne pour les données - Commission européenne