Interview – Rubix S&I : des capteurs intelligents qui traquent les polluants
La pollution de l’atmosphère compte parmi les sujets les plus sensibles de ce siècle. Les particules, l’oxyde d’azote, les métaux, le dioxyde de soufre, le monoxyde de carbone et les composés organiques volatils se répandent et affectent la santé humaine. Les polluants sont responsables de 12 % de la morbidité mondiale. L’OMS et l’EPA (Environmental Protection Agency) estiment par ailleurs que 92 % de la population s’expose à la pollution de l’air.
- Bonjour Jean-Christophe MIFSUD. Quel regard portez-vous sur la qualité de l’environnement atmosphérique ?
- Ce sont ces constats qui vous ont amené à l’idée de créer Rubix S&I ?
- En quoi consiste la solution de Rubix S&I concrètement ?
- Quels sont les cas d’usage d’une solution en intelligence environnementale comme Rubix S&I ?
- Quels sont vos prochains chantiers en faveur de la qualité de l’environnement ?
Bonjour Jean-Christophe MIFSUD. Quel regard portez-vous sur la qualité de l’environnement atmosphérique ?
Il se détériore, c’est indéniable. Cependant la pollution extérieure est une chose, la pollution de l’air intérieur en est une autre. Ce que l’on oublie, c’est que l’air intérieur n’est absolument pas isolé de l’air extérieur. Au sein des bâtiments, nous respirons en plus des polluants extérieurs toutes les émanations provenant des matériaux de construction, des équipements bureautiques ou des produits ménagers. Il n’est pas rare que l’air intérieur affiche une contamination 2 à 5 fois supérieure à l’air extérieur.
Mais l’environnement dans lequel nous vivons ne se résume pas qu’à la qualité de l’air. Le stress, le bruit ou les mauvaises odeurs sont autant d’éléments qui dégradent notre adhésion à notre environnement immédiat. L’être humain est holistique. Nous nous servons de nos 5 sens pour appréhender la qualité de notre milieu de vie. L’analyse environnementale doit donc elle aussi tenir compte de tous ces « polluants ».
Lire aussi : « Qualité de l’air, comment agir en temps réel sur notre environnement immédiat ? »
Ce sont ces constats qui vous ont amené à l’idée de créer Rubix S&I ?
Oui. Malgré ma formation de chimiste et de neurochimiste, je me suis vite aperçu qu’il était difficile de mesurer les goûts, les odeurs, le toucher. Or, pour paraphraser William Thomson (aussi connu sous le nom de Lord Kelvin), « on ne gère bien que ce que l’on mesure ». Je me suis donc efforcé de trouver une solution intelligente pour (1) ramener de l’objectivité dans la capacité humaine à analyser l’environnement immédiat, puis pour (2) agir sur cet environnement afin qu’il redevienne agréable à vivre.
L’idée de Rubix S&I vient aussi de mon expérience professionnelle. Dans la société que j’ai eu la chance de diriger pendant une vingtaine d’années, nous avions conçu les premiers « nez électroniques », puis les premières « langues électroniques », puis les premiers « yeux électroniques ». Mais nous portions encore les échantillons au laboratoire. Avec Rubix S&I, nous avons choisi d’adopter une démarche inverse, c’est-à-dire de porter l’intelligence à l’échantillon. Avec la miniaturisation des capteurs, les capacités actuelles du cloud et le développement de la communication machine-to-machine, c’est aujourd’hui tout à fait possible de procéder ainsi.
En quoi consiste la solution de Rubix S&I concrètement ?
Notre solution se veut être une reproduction fidèle et objective des processus humains de collecte et de traitement d’informations sensorielles. Nos microcapteurs numériques baptisés POD2, qui prennent la forme de cubes de 10 cm d’arête, sont capables de mesurer en temps réel la qualité de leur environnement immédiat, du point de vue des sons, de la lumière, de la température, de la pression, des odeurs ou des vibrations.
Les données sont ensuite envoyées dans le cloud pour être analysées par des modèles en Intelligence Artificielle. Ceux-ci vont chercher à trouver dans nos banques de données une corrélation entre la « signature » de l’évènement et sa nature, ou son origine. Par exemple, nos algorithmes sont capables de déterminer à partir d’un enregistrement sonore qu’il s’agit du cliquetis d’un tour numérique en train de rendre l’âme. À partir de ces informations, des actions correctrices pourront être déclenchées automatiquement.
Quels sont les cas d’usage d’une solution en intelligence environnementale comme Rubix S&I ?
Je pourrais citer par exemple le cas du Groupe ADP qui a adopté notre solution dans le terminal 2E de Charles de Gaulle pour « contrôler » les systèmes de désinfection de l’air intérieur. Nos appareils vont mesurer notamment deux choses : l’impact sur le confort des passagers des molécules de peroxyde d’hydrogène (H2O2) présentes dans l’air et l’indice viral. Notre solution va s’assurer que les paramètres de la GTB (Gestion technique des bâtiments) permettent bien de minimiser en temps réel la propagation du virus, tout en respectant le confort des passagers et des collaborateurs.
En ce qui concerne la qualité de l’air extérieur, nous avons notamment équipé de capteurs le port de Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, qui s’expose régulièrement à de fortes émissions de gaz, ainsi qu’à la propagation d’odeurs et de poussières. À la moindre détection d’odeur de pétrole ou de kérosène, nos capteurs sont capables de localiser l’origine du phénomène et de remonter jusqu’au navire responsable. En parallèle, grâce aux algorithmes, la ville prend automatiquement des mesures de protection pour éviter que les gens se retrouvent dans les panaches de fumées toxiques.
Quels sont vos prochains chantiers en faveur de la qualité de l’environnement ?
Nous avons récemment développé des capteurs liquides qui déterminent la pollution des nappes phréatiques et des bassins de maintenance. Ils traitent ainsi la nature des composés organiques dissous dans l’eau. Dans un futur proche, nous projetons aussi de monter un système de reconnaissance faciale, pour identifier le sentiment, la perception et les réactions d’une personne face à son environnement (gêne, dégoût, colère, etc.). Toutes ces informations alimenteront notre base de données, dans le respect du RGPD (Règlement général sur la protection des données) bien entendu.
Notre ambition est de créer une véritable symbiose entre les environnements et les personnes qui s’y trouvent. Nous devons donc améliorer sans cesse notre banque de données sensorielles, afin de faciliter la traque des polluants et d’être en mesure d’agir efficacement en temps réel sur le confort des populations.
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