Aéroports et risque de pandémie – Quelles pistes technologiques réalistes pour demain ?
Le mythe de la distanciation sociale en aéroport
Un aéroport est par définition un lieu de confinement où la distanciation sociale est quasi-impossible à respecter. De l’enregistrement des bagages à l’embarquement, les passagers entrent dans un flux, ponctué de zones d’attente et de points de contrôle. Tout le modèle de l’aéroport moderne, et des compagnies aériennes, repose sur cette capacité à embarquer le plus rapidement possible le plus de passagers possibles dans un espace contraint offrant un vaste choix de services, boutiques et restaurants.
Cependant, pendant les mois ou les années de circulation du COVID-19, les aéroports devront prendre des mesures rapides pour limiter les risques de propagation. Et dans ce contexte, les technologies digitales auront leur mot à dire. Toutes ? Non, les premiers échanges avec les acteurs aéroportuaires montrent que les technologies à base d’IA ne sont pas à l’ordre du jour, tout au moins à court terme. Trop complexes à mettre en place, avec peu de cas d’usages réalistes.
Ainsi, l’une des premières mesures immédiates qui semblent faire consensus est de s’assurer que les points de contact soient correctement désinfectés, avec dans certains cas un recours à la robotique pour multiplier les nettoyages. Il est d’ailleurs fort probable que les passagers utilisent d’eux-mêmes, et de manière massive, les solutions de gel hydro-alcoolique disposées à chaque étape critique de leur parcours. Pour garantir la disponibilité du produit, des capteurs connectés pourront venir monitorer le taux de remplissage de chaque distributeur de gel.
L’utilisation de caméras thermiques est aussi fortement testée dans l’idée de faire monter dans les avions des personnes n’ayant pas de signes visibles d’affection (comme la température) et d’effectuer un contrôle à l’arrivée. Mais cette solution impose de repenser la gestion des flux aux contrôles, en prévoyant d’extraire les passagers à risque pour un contrôle humain plus poussé.
Un tournant dans la digitalisation des aéroports ?
Jusqu’à présent, les politiques digitales des aéroports poursuivaient deux objectifs : créer un parcours passager le plus fluide possible et offrir un début de voyage positif. Avec cette idée que les aéroports cherchent à rompre avec l’image froide de la zone de transit pour devenir de véritables lieux de vie chaleureux.
Aujourd’hui, ces deux tendances de fond sont contrariées par le COVID-19, mais il y a peu de chances qu’elles soient remises en cause totalement. Les technologies digitales qui feront leur entrée dans une période post-covid devront donc à la fois tenir compte des orientations stratégiques de fluidité des parcours et de réduction du stress des passagers, tout en intégrant la nécessité d’effectuer des contrôles sanitaires supplémentaires.
Cela pourrait être le cas, par exemple, de la création de files d’attente virtuelles à chaque point de contrôle du parcours. Via l’application smartphone de l’aéroport, les passagers se verraient attribuer un créneau horaire précis auquel se présenter à tel ou tel point de contrôle. Plutôt que d’attendre dans la file, les passagers auraient alors la possibilité de profiter des services de proximité de l’aéroport. Cette démarche viendrait également renforcer la relation personnalisée que les aéroports souhaitent créer avec chaque passager.
Enfin, pour limiter les interactions, et donc les risques de contamination, sans pénaliser la fluidité du parcours, nous pourrions imaginer une évolution des écrans tactiles vers des bornes libre-service sans contact. Les technologies de reconnaissance vocale ou d’analyse des gestes à distance sont aujourd’hui suffisamment matures être utilisées par le plus grand nombre.
La crise actuelle vient chambouler en profondeur l’accueil des passagers dans les aéroports. Cependant, l’objectif reste toujours le même : continuer d’en faire des lieux de vie où l’on débute une vraie expérience de voyage, tout en se sentant en confiance. La crise ajoute un niveau de complexité supplémentaire et ouvre la réflexion sur les parcours passagers. Dans ce contexte, les technologies seront un support certain, mais elles ne feront pas tout. L’humain doit aussi trouver sa place dans le nouvel équilibre à mettre en place, afin de rester en phase avec les fondamentaux du métier des aéroports : contrôle et rigueur d’une part, accueil et services personnalisés d’autre part.